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Guy Delaunay
mercredi 6 février 2019, par
Claude Simon et le religieux ?
Il s’agit pour moi d’effectuer un retour à l’œuvre de Claude Simon, après plus de quarante ans.
À l’origine, en 1973, un mémoire de maîtrise de lettres modernes intitulé « Analyse structurale de la Bataille de Pharsale », portant sur un auteur pratiquement inconnu à cette époque, Claude Simon. L’étude présupposait un certain nombre de théories d’analyses textuelles à base de linguistique française. Tels, l’emploi de l’analyse fonctionnelle de Roman Jakobson, l’opposition récit-discours de Charles Benvéniste, l’emploi de la métaphore et de la métonymie, l’usage d’une rhétorique des figures, et, bien-sûr, le concept d’intertextualité…
Des années plus tard, m’étant orienté vers des études en sciences religieuses dans une faculté de théologie catholique, donc un tout autre contexte universitaire, et ayant eu connaissance de la parution des autres œuvres de Claude Simon, entre-temps bien justement « nobellisé », j’ai eu l’idée de revenir sur une question qui, déjà à l’époque, m’avait perturbé. Je veux parler du traitement du religieux dans son œuvre.
La lecture du chapitre « César » de la Bataille de Pharsale me déciderait presque à reprendre cette question. En effet l’extraordinaire description des pages 126-127 (édition de minuit, 1969) évoque de façon saisissante la Passion du Christ sous le regard implacable d’un César figé dans tout son Pouvoir. Le politique terrassant le Christianisme au plan spécifiquement terrestre : « Jésus tombe pour la première fois – Jésus tombe pour la seconde fois » [Pas de troisième fois ici : elle sera la revanche (mais pour quel résultat effectif ?) de l’autre Logique, la Logique religieuse chrétienne. Dans ces pages, dans tout le vertige du paradoxe simonien, peut-être une des plus belles pages de la littérature française.
Ainsi, une analyse minutieuse resterait à faire pour étudier la fonction du religieux dans l’ensemble de l’œuvre simonienne. On le découvrirait probablement dans toute son ambiguïté et dans toute sa complexité.
Guy Delaunay