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Blanc, Anne-Lise. « Claude Simon côté chair » (2014)

dimanche 26 février 2017, par Christine Genin

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Texte

Référence(s)

Les gens moraux n’aiment pas les prostituées. Ils n’aiment pas tout ce qui leur rappelle qu’ils ont un corps et que ce corps disparaîtra. Ils regrettent d’avoir un corps, des mains, des yeux. Les gens moraux savent parfaitement bien qui ils sont et ils ont horreur de tout ce qui vient leur rappeler qu’ils ne sont rien. C’est pourquoi l’Occident qui est essentiellement moral déteste les femmes qui voient les hommes passer. Les gens moraux de l’Occident mettent volontiers un crâne sur leur table de travail et ils disent que c’est un objet de méditation. Mais ce n’est pas vrai, c’est seulement pour se prouver qu’ils sont vivants et qu’ils existent et c’est cela qui leur donne une satisfaction. Si c’était pour penser à la mort, ils ne mettraient pas un crâne. Ils ne mettraient rien. Peut-être la vue d’un os, la seule chose qui restera d’eux-mêmes les console-t-elle un peu. Mais pas la chair, pas la matière périssable. Pas les femmes qui donnent cette matière périssable, qui leur rappellent cette matière périssable, et l’assujettissement où ils sont par rapport à cette matière, ce ventre, le haïssant, le désirant, le maudissant, le méprisant, le regrettant, ce ciel d’entrailles maternelles et obscures dont Greco peignait sans repos la douloureuse nostalgie. La Corde raide (1947)

Dès La Corde raide, Claude Simon témoigne d’une volonté de se démarquer des précautionneuses préventions que, dans nos sociétés, la moralité nourrit à l’égard de la chair et de la discutable distinction (sans doute inspirée par le discours dominant de la théologie catholique) qu’elle tient à faire entre chair et esprit. Épousant à dessein un point de vue cynique, il souligne la vanité des « gens moraux de l’Occident » qui se détournent de la chair pour en fuir les alarmes et feignent la sagesse à travers de prudents faux-semblants. Au contraire, il salue « l’inhumain et majestueux détachement des putains qui voient naître, grandir, s’accomplir et mourir la raison essentielle de l’homme, se succéder sur leur corps immuable les existences » [1]. À ses yeux, l’inextinguible désir qu’éveillent leurs chairs interchangeables et transmissibles, comme l’immémoriale fonction des filles de passe leur confère, outre une connaissance suprême de la fugacité de l’existence, l’exceptionnelle faculté, en dépit de leur « matière périssable », d’échapper aux outrages du temps. Elles incarnent, comme les robes « retapées sans fin » [2] des virginales sœurs de Pierre dans L’Herbe dont elles pourraient pourtant paraître l’antithèse, « la permanence immatérielle d’un mythe à travers le temps putrescible » [3].

Claude Simon n’a jamais souhaité la réédition du texte de La Corde raide, publié au début de sa carrière d’écrivain et devenu à peu près introuvable, mais c’est essentiellement parce qu’il n’en approuvait pas a posteriori la manière (sans doute jugée trop discursive et personnelle) et non parce qu’il en désavouait l’esprit ou la matière.

Ainsi l’intérêt que l’auteur y manifeste pour la chair, s’il prend ensuite des tournures toutes différentes, n’est jamais démenti dans l’œuvre. Tantôt objet de commerce et de consommation ou de désir et de contemplation, tantôt siège de souffrance ou, plus généralement, promesse de plaisir, la chair même y semble particulièrement présente : celée, découverte ou, plus souvent, entrevue sous l’écorce des êtres et des choses, derrière les écrans du réel, et comme apparue.

Est-ce à dire qu’elle procède au moins autant de celui qui l’épie, la forme et la conçoit que de ce qu’elle anime et emplit de matière ? Il semble qu’en effet, la chair soit, par nature, hybride, intervallaire, nomade : à mi-chemin entre la réalité tangible et la vision, à la croisée des regards et des corps. Toujours potentiellement présente, comme un principe vital – dans les corps mourants elle est significativement momifiée –, elle est aussi toujours au moins double. Et c’est cette fondamentale ambivalence (tantôt robuste et tantôt fragile, elle peut apparaître menaçante ou protectrice) alliée à une nature interstitielle (la chair est un tissu complexe, entre la peau et les os, la structure et la surface), mais aussi la fertilité proprement émouvante de « toute cette chair, toute cette tiède et souple pâte gonflée, debout là dans l’attente de sa forme définitive, du moule » [4] qui éveillent, au-delà du désir de l’homme, l’énergie créatrice de l’auteur.

Modulations de la chair

L’intérêt du narrateur simonien pour la chair dépasse de beaucoup la profonde sympathie de l’auteur à l’égard des prostituées. Il témoigne d’un sensuel rapport au monde et, plus largement, d’une vive sensibilité à « toute la chair du monde » [5]. Caractéristique aussi des premiers personnages de l’œuvre, cette sensibilité qu’aiguisent les visions ou les relations charnelles s’exprime tout particulièrement à travers la perception qu’ils ont du monde après l’amour physique. Bernard, l’adolescent du Sacre du printemps, à peine sorti de la chambre d’hôtel où Josy l’entraîne en pleine après-midi, semble poursuivre l’expérience de son égarement (que suggère déjà l’ellipse de la scène dans le récit) à travers le déploiement de considérations générales sur la chair que lui inspire aussi le « maelstrom humain » qui l’entoure dans le métro où il se retrouve bientôt

[...] encastré entre les corps pressés, le magma d’os et de muscles fatigués, pensant maintenant à la chair exigeante, avide et craintive, poursuivie sans trêve tout au long de son existence par les deux terreurs jumelles de la faim et de l’anéantissement, et s’exténuant, s’insurgeant, possédée du désir furieux de se survivre et de sortir de soi comme s’il était possible de filouter son destin, sauter à travers et dans une autre peau avant que celui-ci s’en soit aperçu ; et il pouvait percevoir comme des millions de haletants accouplements, les millions de femmes en cet instant sur le dos, avec leurs râles, leurs tendres fleurs mauves ouvertes, les millions de haletantes agonies de la chair destinée à périr, et bientôt morte pour de bon, et bientôt puante, et bientôt pourrissant peu à peu sous la terre oublieuse et indifférente [...] [6].

Dans le chaos du monde et de l’esprit de Bernard où tout se mêle en un « magma » indifférencié, et où le jeune homme se réduirait lui-même à « la chair » s’il n’était capable d’en considérer en pensée la destinée, il semble que tout ne soit que « chair » : une et inapaisable mais vouée à se corrompre, elle s’exprime en une multitude de râles identiques qui semblent de plaisir mais qui sont d’agonie. Dans L’Herbe, Louise, elle, en même temps qu’elle prend conscience qu’elle ne suivra pas son amant, entre en symbiose avec le monde de l’herbe qu’après avoir senti « son corps tout entier imprimé sur la terre » [7] elle rejoint :

[...] couchée maintenant de tout son long sur le sol, adhérant au sol, enfonçant, enfouissant son visage dans l’herbe fraîche, comme pour l’y imprimer, respirant longuement l’odeur puissante et âcre d’herbe et de terre mêlées (mais pas les larmes : les yeux fermés, secs), respirant simplement, s’emplissant tout entière de l’odeur végétale et pure, puis se relâchant, s’abandonnant, toujours allongée sur le ventre, mais la tête tournée sur le côté, pouvant maintenant sentir s’imprimer dans sa joue les croisillons d’herbe écrasée [...] [8].

On retrouve maintes fois dans l’œuvre ce désir de fusion ou cet effet de confusion avec la chair du monde qu’éveille, après le plaisir, et parfois à lui seul le sentiment de l’imminence de la mort. Dans La Corde raide, le narrateur, à la fin, imagine sa mort comme une mue dont il serait le siège, « écoutant l’arbre palpiter et s’ouvrir, pousser ses ramures à travers moi » [9] et, dans La Route des Flandres, lorsqu’à la suite d’une embuscade et d’une chute dans un fossé il se voit mort, il se représente « à demi englouti, repris par la terre, sa chair se mélangeant à l’humide argile » [10] à « la dure et pourpre chair de cette terre à laquelle il était collé pour ainsi dire ventre à ventre » [11].

Ainsi la chair, qui n’est ni la marque ni l’apanage de l’humain, apparaît chez Claude Simon comme ce qui, en tous sens, rappelle l’homme à sa nature ou plus exactement à la nature : celle des jeunes filles leur « révèl[e] avec une brutalité sanglante une réalité qui les apparente aux sources, à l’herbe, à la terre odorante et molle » [12] d’après le beau-père du Sacre du printemps. Originelle, elle engendre un désir mélancolique et présente un horizon fantasmatique que Bernard se figure comme le « sein tiède et noir dont est issue toute vie et après quoi soupire la chair nostalgique et gémissante hantée par le désir, et plus que le désir le besoin, et plus que le besoin la nécessité d’y retourner, d’y mourir à nouveau » [13]. Cet horizon toutefois n’est jamais qu’un mirage comme le suggère bien la « voix féminine impatiente et brusque » qui vient interrompre la rêverie de l’adolescent, « l’interpell[ant] » [14] au téléphone.

Si c’est surtout à la chair des femmes que Claude Simon se réfère comme à une chair parfois inaccessible, dans ses fictions, l’effet troublant de « toute cette chair de femme » [15] s’étend souvent à toutes les chairs du monde : à d’autres chairs humaines bien sûr, mais aussi à la chair des choses ou encore à des chairs animales ou végétales qui sont parfois si proches des chairs humaines qu’elles en paraissent des avatars. Ainsi, comme photographe, Claude Simon se montre non seulement sensible à la chair féminine (plusieurs nus figurent dans l’album Photographies parmi lesquels se distingue, en fin d’ouvrage, une femme de tête, Réa) [16] , mais également à celle (fesse, ventres, cuisses) que laissent voir les petits gitans [17] en guenilles qui se laissent photographier sans réticence. Mais au-delà de celle des êtres, il révèle la sensualité singulière qui émane des objets qui les entourent et ainsi, souvent, en semblent, reliques ou mues, de furtives évocations : le mouvement d’un tissu qui flotte au vent, la nudité d’une poupée qui traîne, la courbe d’une cage renfermant un oiseau, la transparence, enfin, d’ordinaires vêtements de femmes (soutien-gorge, tabliers, combinaisons) pendus à un fil (la légende les désigne comme des « enveloppes de femmes ») [18] signalent métonymiquement la chair voisine, familière mais fugace.

Maintes choses paraissent ainsi, dans leurs courbes, par leur allure, ou l’apparence de leur texture, susceptibles d’accueillir et d’exprimer l’idée d’une chair dont elles suggèrent la présence au regard avide du photographe, comme à celui de l’écrivain. Ou plutôt, elles apparaissent comme les vecteurs d’un désir secrètement présent dans ce regard que la capture photographique et l’écriture révèlent particulièrement bien quand l’une explicite l’autre. Dans Album d’un amateur, Claude Simon montre ainsi le pouvoir de séduction qu’ont sur lui les couleurs en détaillant le trajet visuel auquel elles l’invitent dans une des photographies (prises lors de voyages) de groupes de nomades capables, à leur insu, de « compos[er] spontanément des ensembles chromatiques qui semblent savamment orchestrés » :

[...] partant d’une tache de lilas fané sur l’extrême droite de la photographie, on arrive, à gauche, à ce vert olive barré de bleu pâle et bordé d’un galon d’or en passant par des mauves éteints, les rayures vertes et jaunes de la jupe d’un enfant à la veste couleur de fruit et l’harmonieux déhanchement de la jeune femme au sari rose [19].

À son tour savamment orchestrée, la description de l’image qui semble d’abord ne s’attacher qu’aux taches de couleur s’intéresse peu à peu aux sujets qui prennent corps sous le regard qui, d’observateur, devient gourmand (« couleur de fruit ») et admiratif (« harmonieux »). Les accords chromatiques mènent au corps fluide d’une jeune femme que sa posture naturellement sensuelle rend d’autant plus désirable qu’elle est vêtue de « rose », la couleur par excellence de la chair.

En général, Claude Simon se montre sensible à la voluptueuse apparence du monde qui l’entoure : celle par exemple de « hauts platanes » auxquels, dans Photographies [20], il attribue des légendes anthropomorphiques « Jambes » puis « Ventre et cuisses » et qui déjà dans Album d’un amateur

[...] évoqu[aient] de façon troublante des cuisses de femme se rejoignant sur le gonflement d’un pubis.
Comme si quelque métamorphose ovidienne (châtiment ou, au contraire, faveur ?) avait perpétué sous l’écorce mouchetée le corps de quelque amante, de quelque nymphe sylvestre et géante au bassin renflé, aux jambes semblables à des fûts de colonnes retournant au règne végétal, fouillant le ciel de leurs racines [21].

L’auteur, qui mêle dans son commentaire les références (littéraire, prosaïque, mythologique), signale ici le caractère trouble de la chair qui invite au mélange des règnes, tend à brouiller les lisières. Ce trouble se lit également dans les images photographiques des nus presque tous ombrés ou floutés chez Claude Simon. Source (ou effet,) d’une inquiétude autant que d’une émotion, il indique aussi que la chair matérialise, au-delà des corps exposés, les secrets replis d’êtres ou de choses dont elle ne semblait d’abord exprimer que la face désirable et la véritable nature. Il laisse ainsi deviner que, comme matière non seulement malléable mais aussi corruptible, la chair est toujours aussi empreinte de gravité, et que sous elle gît souvent « comme un noyau de mort » [22].

Ambivalente, la chair est peut-être d’autant plus désirable qu’en dépit de sa vitalité, elle apparaît singulièrement vulnérable.

Fragilités de la chair

Siège de souffrance en temps de guerre, constamment mise à mal, comme les identités, par un conflit dont la violence intolérable égare et frappe en pleine chair, la chair est toutefois assez rarement évoquée dans le détail à travers les effets que la guerre a sur elle. Sans doute est-ce en raison du caractère stupéfiant de ces effets dû en particulier à l’intangible, fulgurant et proprement inconcevable passage, en ces circonstances, de la menace à l’anéantissement. Georges qui, dans La Route des Flandres, « avait fini par se confondre avec l’idée même de guerre », s’il peut « sentir les ténèbres froides », devenues comme un métal hostile, « adhérer à sa chair » [23], ne parvient pas à comprendre comment le cheval mort, rencontré sur la route le matin et revu le soir, a pu perdre aussi vite sa forme et sa substance et, « non plus viande boucanée et puante mais transmuée », avoir été « assimilé par la terre profonde » : « mais ce n’était pas possible, pensa Georges, pas en un jour » [24].

Outre qu’elle se heurte à l’inouïe transformation des chairs en « chaux friable » [25] par la guerre qui carbonise et mêle la « chair d’adolescents » [26] aux déchets indéfinissables dont la charpie jonche les lieux traversés par les combats, l’évocation des chairs meurtries est confrontée, dans l’œuvre, à la difficulté de parvenir « avec des mots [à] faire exister l’indicible » [27].

Dans L’Acacia, le narrateur évoque des cavaliers à l’allure somnambulique, « exténués » [28] par une guerre que leur incrédulité rend irréelle et presque féerique, « inexpressifs » [29], et qu’une résignation collective à la mort contribue à désincarner. Il est, au contraire, longuement question des blessures de leurs chevaux, vaillantes

[...] montures fourbues aux échines écorchées (les deux seules fois où ils avaient pu desseller, la peau était restée accrochée par lambeaux aux tapis dessellés, la première fois larges comme des pièces de monnaie, la seconde comme la paume, laissant voir les plaques de chair à vif, violacée, déjà purulente), [...] capables encore de galoper si une fois de plus les éperons labouraient leurs flancs ensanglantés : dociles, douloureux, tragiques, continuant à avancer jusqu’à ce qu’ils butent une première fois, relevés à l’éperon, puis une seconde, et enfin, sans préavis, fléchissant des jarrets, s’effondrant et ne bougeant plus, couchés sur le côté, ne conservant plus de vivant ou plutôt d’humain que leurs grands yeux d’almées, pensifs, sans fond et déchirants [30].

C’est, dans l’évocation précise et pathétique que le récit fait de ces chevaux « déchirants » qui, écorchés vifs, s’affalent, à bout de force, sous le poids d’un conflit inhumain, que s’exprime finalement la souffrance des hommes et le souvenir de la chair blessée. À travers l’épanorthose (« ou plutôt ») qui, sans pouvoir redresser les bêtes tombées à terre, leur prête nature humaine et la mention de leurs « grands yeux », on peut lire la suggestion de leur fragile délicatesse de danseuses en même temps que celle de leur pouvoir de réflexion. En même temps que leur vulnérabilité le texte exprime l’indignation inapaisable et « sans fond » que procure le rappel de leur martyre, mais aussi la difficulté de dire, pour le narrateur, celui de sa propre chair.

Si la chair ainsi est rarement décrite dans le détail de ses blessures, elle apparaît au contraire comme l’une des matières les mieux disposées chez Claude Simon à porter les stigmates du temps. Propice à la dissociation, elle est alors d’ailleurs le plus souvent désignée, dans cette perspective, par un pluriel. La chair apparaît, à travers sa défaite, comme l’un des motifs majeurs de L’Herbe [31]. Elle n’est pourtant pas représentée, dans ce roman, par Marie (personnage inspiré par une tante de l’auteur, Tante Mie) dont l’agonie est au centre de la diégèse. Indifférente à la chair (aux yeux de sa belle-sœur elle est même « la négation de la chair »), Marie conserve un « corps intact » [32] et quoiqu’elle dépérisse, elle apparaît dans le texte comme une figure de la constance que sa robe sombre inlassablement rapiécée et ses chairs desséchées semblent mettre hors d’âge. La chair ne renvoie pas tant, non plus, à Louise dont la rencontre charnelle avec son amant au milieu de la nature et à la fin du roman n’offre aucune issue à sa faillite de femme mariée, qu’au vieux couple en déroute que forment Pierre et Sabine que l’on retrouve dans La Route des Flandres où ils ne semblent plus chacun qu’« un assemblage de chairs prêtes à se séparer » [33].

Pierre s’est mué en un monstrueux amas guetté par l’immobilité. Le récit le présente « luttant à la fois contre son corps difforme, cette sorte d’outre, de chancelante montagne, et la vieille Déjanire hoquetante » [34] qu’est devenue sa femme. Il n’est plus qu’une

[...] masse difforme à l’intérieur de laquelle le vieillard se trouve emprisonné, comme bâillonné, muré dans sa propre chair, celle-ci occupée à se nourrir (ou plutôt se détruire : comme si par l’effet d’une facétieuse malédiction, d’une imbécile et mortelle revanche de la matière, l’acte naturel – absorber des aliments – destiné à entretenir la vie aboutissait maintenant à un résultat en quelque sorte inverse : son lent étouffement par son excès même) [...] [35].

Sabine, clinquante et volubile, indécente, « avec ses cheveux rouges, son visage fané et peint, sa chair vulnérable [...] incarn[e] on ne sait quelle pathétique protestation, quel pathétique et inégal combat perdu d’avance [...] contre le temps » [36]. Artificiellement liés par leur fils, Georges, l’improbable produit de leur union que Pierre considère avec une « songeuse incrédulité » [37], et secrètement accordés par les sournois et brusques assauts que le temps fait subir à leurs chairs, ils n’offrent à l’inéluctable passage du temps (l’un en se résignant et en se figeant, l’autre en gesticulant) que la pitoyable et vaine résistance de leurs corps défaits et promis à l’informe comme semble le suggérer la figure filée dans le texte du glissement de terrain :

[...] (les choses se passant, comme dans ces mouvements de terrains lentement et sournoisement minés, par de brusques à-coups) les chairs se désunissant pour ainsi dire, se ravinant, glissant par saccades, de sorte que ce n’était pas à la suite d’une imperceptible transformation modifiant par d’infinitésimales retouches leur aspect extérieur que le vieux couple était maintenant devenu ce qu’il était mais par une suite de soudaines mutations [...] [38].

La vanité de « la chair putrescible, gémissante et terrifiée » [39] ainsi développée à travers ces deux figures à la fois discordantes et complémentaires semble exprimer l’inéluctable misère de l’homme, la réversibilité des choses et la fugacité de l’existence dont les chairs portent le sceau. Mais ce motif privilégié de la chair ne laisse pas aussi, comme « la femme iris » de L’Herbe, d’« exhal[er] cette déchirante mélancolie des fleurs fanées » [40] qui, à l’évidence, aiguise l’énergie créatrice de l’écrivain.

Le salut par la chair

Dès La Corde raide, l’auteur associe la mélancolie à l’irrépressible élan érotique (« je la désirais terriblement ») que suffit à éveiller la chair entrevue de la femme aimée et qu’attise sans doute secrètement la perspective d’un départ (« Je tâchais d’oublier que j’allais être obligé de partir ») :

[...] il suffisait [...] que je la regarde quand nous étions sur la plage, surtout au-dessus de l’aisselle, à l’endroit où le sein se rattache à l’épaule et où la densité de sa chair formait deux petits plis, pour que je sente de nouveau le désir douloureux me remplir, une vague, une poussée mélancolique, attendrie, suffocante [41].

Loin d’être un sentiment stérilisant né d’un désenchantement et conduisant, au mieux, à la déploration, la mélancolie est même définie par S., dans Le Jardin des Plantes, comme une disposition « active, désirante », un « furieux désir de vivre » [42] que provoque le fort pressentiment d’une mort imminente et qui se trouve à l’opposé de

[...] la lamentation du poète « La chair est triste, hélas, et j’ai lu tous les livres », et S. dit que c’était même exactement le contraire [...] quelque chose de violent qui protestait, furieux, bâillonné mais hurlant : Jamais je n’avais tant désiré vivre, jamais je n’avais regardé avec autant d’avidité, d’émerveillement, le ciel, les nuages, les prés, les haies... [43]

Cette mélancolie qui postule la vie, aiguise les sens et ne demande qu’à s’exprimer, s’avère finalement féconde et même prolifique pour le survivant devenu écrivain. Mais elle ne l’est qu’une fois la commotion passée, et, fureur nécessairement empressée (c’est la conscience aiguë de sa finitude qui la souffle), c’est dans la rencontre charnelle qu’elle trouve sa première et naturelle échappatoire.

Quoique ses effets de conversion de la souffrance en joie soient provisoires, c’est le puissant pouvoir de séduction et, partant, de consolation de la chair qui souvent en soutient le désir dans le texte simonien. Et peut-être même, est-ce, au fond, la fugacité de ce pouvoir qui alimente la ténacité du désir qu’il éveille. La rencontre charnelle s’avère en tout cas toujours propre à procurer promptement l’illusion qu’on peut omettre l’histoire, estomper le réel et même dépasser d’humaines limites qu’elle commence pourtant souvent par rappeler. La chair aimante, attire l’œil, attise le désir parce qu’elle permet au sujet (corps et esprit) de se vider de sa substance, de se régénérer et généralement de s’évader. Ce rôle d’exutoire est ce qui fait des filles de joie, plusieurs fois dans l’œuvre, des médiatrices d’autant plus providentielles qu’anonymes, elles ne sont guère différenciées, et que, presque exclusivement chair, elles favorisent, en retour, l’oubli de soi.

Le narrateur simonien ne considère toutefois pas ces filles à vendre avec un angélisme naïf. Il ne masque ni leur indigence ni les artifices auxquels elles recourent. Souvent, il les évoque dans un contexte insalubre, un décor fruste et des vêtements sommaires comme ces

[...] combinaisons décolorées à force d’avoir été lavées non plus roses bleues ou amande mais d’une seule et même teinte semblait-il javellisée pour ainsi dire à peine différenciée par de pâles modulations bordées par ce qui avait sans doute été autrefois de la dentelle maintenant de vagues festons jaunâtres ajourés pendant ou peut-être simplement les franges de la soie élimée  [...] [44]

qui, dans La Chevelure de Bérénice, semblent se confondre avec les corps déteints des filles à la « chair tout entière épaules poitrine cuisses décolorée passée aussi semblait-il à l’eau de Javel grisâtre » [45]. Et leur posture comme leur accoutrement sont toujours manifestement calculés comme ceux de ces « filles à demi nues ou vêtues de porte-jarretelles » qui, pour des photos de magazines,

[...] soulèv[ent] leurs combinaisons ou se t[iennent] à quatre pattes pour exhiber leurs croupes avec des gestes et des mimiques invitant non à une étreinte, pas même à une saillie, mais à l’assouvissement de quelque besoin naturel et malodorant comme ceux que l’on satisfait en déboutonnant son pantalon dans la puanteur des feuillées ou des lieux d’aisance [46].

Le narrateur ne manque pas ici, passant d’« étreinte » à « saillie » puis à « besoin malodorant et naturel » de signaler, à travers la dégradation sémantique, le caractère purement physiologique de la concupiscence qu’elles éveillent chez les hommes qui contemplent leurs poses suggestives. Mais il signale dans le même temps le caractère irrépressible et presque vital de ce besoin de chair (fût-ce sur papier glacé) qu’éprouvent les hommes qui, revenus de patrouille à leur cantonnement, anesthésiés pas le froid « (ce n’était plus leur chair, leurs os qui le percevaient : seulement leurs narines, comme s’ils eussent respiré les émanations glacées de quelque fiole de pharmacie, comme de l’éther) », « ivres de sommeil et de fatigue, à demi inconscients » [47], envahis par un « indéfinissable dégoût » se chauffent au poêle rallumé avec « les pages déchirées de livres de piété ou de manuels scolaires » et aux « cuisses grasses et pâles des bonniches déculottées » qu’ils « contempl[ent] en jurant », « encore sanglés dans leurs buffleteries » [48].

Ce besoin apparaît d’autant plus général qu’il est également éprouvé par « les officiers » qui, quoiqu’ils bénéficient de meilleurs traitements, n’en « cach[ent] » pas moins sous

[...] les manuels du service en campagne et les lettres inachevées aux aristocratiques fiancées [...] les mêmes photos aguicheuses (quoique celles réservées aux simples soldats fussent imprimées sur un mauvais papier et à l’aide d’une encre bistre et bon marché : celles des officiers en technicolor et sur papier couché, leurs nudités bronzées et nonchalamment étendues au bord de piscines ou sous des patios californiens) [...] » [49].

Quoiqu’il échappe d’autant moins au stéréotype qu’il est assouvi, dans un contexte guerrier où, de l’aveu du narrateur d’Histoire, « un tonneau avec sa bonde ouverte [...] aurait fait l’effet d’une aphrodisiaque apparition » [50] et par l’intermédiaire de clichés photographiques provenant d’illustrés spécialisés, ce besoin salutaire apparaît comme un exutoire d’une rare efficacité. Dans l’avant-dernier roman de Claude Simon, L’Acacia, le bordel et la chair qu’il y consomme apparaissent même comme l’indispensable sas qui permet au narrateur de revenir à la vie civile après avoir survécu à l’anéantissement de son escadron et à l’évasion d’un camp de prisonniers, de redevenir un « homme normal » [51]. « N’aspirant [d’abord] à rien d’autre qu’à l’inertie de la matière » [52] et tourmenté par les images d’une guerre qui l’a réduit à l’état de bête, il quitte finalement le « mausolée familial » [53], lui-même hanté par ses énigmatiques ancêtres, où il croyait pouvoir trouver refuge, et, mû par une ardeur qu’il compare à celle de « ces chiens [...] guidés d’instinct ou par quelque obscur cheminement de la mémoire vers l’endroit où ils savent trouver à coup sûr la pâtée, la femelle en chaleur ou la poubelle qu’il leur faut » [54], il entreprend de se rendre dans une maison de passe. Il semble alors significatif qu’il se heurte d’abord littéralement (« s’obstinant à appuyer rageusement sur le bouton de la sonnette puis saisissant le heurtoir, frappant avec violence, écoutant retentir comme des explosions dans la rue silencieuse la grêle de coups ») [55] à des portes closes avant qu’une « nouvelle porte » ne s’ouvre. Le répit que procure aussitôt cette ouverture désirée d’une porte « légèrement entrebâillée, laissant voir une bande de lumière rosâtre qui venait de l’intérieur » [56], promesse de « quelque chose comme une fleur pâle » que quelques minutes plus tard une des jeunes femmes venue au-devant de lui « entrouvr[e] » [57] à son intention, est alors marqué dans le texte par un alinéa, légère suspension dans le texte alors dense, commissure ouverte du récit, signe annonciateur d’une échappée possible dans l’histoire.

Les deux corps de femmes que le narrateur choisit d’inviter peu après à répondre à son avidité lui permettent, une fois le « monde extérieur [...] aboli » [58], de s’abîmer « corps et esprit » [59], de « se noy[er] dans les tièdes éclaboussures de chair » [60] pour retrouver au fond de lui une poussée vitale que favorise son bouleversant corps à corps avec :

[...] quelque chose de vivant, mobile : crins, muqueuses, lèvres, salive, langues, yeux, voix, souffles : la chair sans mensonge, crédible, docile dans ses mains, se mouvant, s’écartant, s’ouvrant : la solitude, la mort, le doute conjurés, vaincus, puis même plus, plus rien d’autre que cette ruée, ce maelström, tandis que toutes les particules de son corps l’abandonnaient, se précipitaient, se rassemblaient dans un assourdissant tapage au bas de son ventre, en avant de son ventre, éclataient, jaillissaient dans quelque chose de brûlant, sans fond, sans fin... [61]

Disponible, malléable et polymorphe, la chair n’impose ni ordre ni réflexion et semble sans limites : mouvante et émouvante, elle « rassemble » des forces qu’elle laisse « éclater », fige les souffrances, précipite (comme le suggère le rythme affolé de la phrase) le dérèglement des sens, agrandit l’espace comme le temps (« sans fond, sans fin ») : à travers elle le monde peut se transfigurer.

Au désordre près, ses propriétés sont donc assez semblables à celles que Claude Simon prête au « langage », « au sein » duquel « ce qui est souvent sans rapports immédiats dans le temps [...] ou l’espace [...] peut se trouver rassemblé et ordonné » et où « les mots éclatent comme autant de chandelles romaines, déployant leurs gerbes dans toutes les directions » [62] offrant les perspectives les plus diverses. Dynamique, la langue a d’ailleurs souvent l’aspect de la matière, chez Claude Simon. Une matière qui reste indistincte, polymorphe, mobile et menacée comme les « paroles se détachant [des] lèvres » de Louise qui, dans L’Herbe sont d’abord « comme la fumée un instant suspendues » [63] puis telles une

[...] boule grise roulant sur elle-même, les sons prononcés, les mots roulant les uns sur les autres, c’est-à-dire montrant leurs diverses faces, leurs diverses combinaisons – ce pourquoi l’on dit sans doute « tourner et retourner des paroles » –, puis (les mots, l’assemblage de mots) s’effilochant, se désagrégeant, se dissolvant [...] [64]

Pas moins fragile donc que la chair des hommes, elle peut être viciée par son usage, pulvérisée par les malentendus, figée par l’inscription et, ainsi, se corrompre comme les conventionnelles inscriptions funéraires d’un cimetière qui, personnifiées, dans Le Palace, semblent promises au même sort que ce qu’elles sont censées désigner :

[...] les lettres dorées des plaintives inscriptions courant parmi les fleurs de perles mauves, comme écœurées par leur emphase de camelote, ne proposant plus à la fin au visiteur qu’un énigmatique squelette de langage où adhère encore par endroits la chair raccornie [sic] de lambeaux de voyelles et de lambeaux de diphtongues [...] [65]

Ainsi les mots peuvent-ils sembler décharnés ou, au contraire lascifs et empreints d’une « lourde sensualité » [66] mais, même tronqués, ils apparaissent surtout toujours d’une incontrôlable fertilité :

Chaque mot en suscite (ou en commande) plusieurs autres, non seulement par la force des images qu’il attire à lui comme un aimant, mais parfois aussi par sa seule morphologie, de simples assonances qui, de même que les nécessités formelles de la syntaxe, du rythme et de la composition, se révèlent souvent aussi fécondes que ses multiples significations [67].

Conclusion

Pour Claude Simon, la langue est, comme la chair, matière ductile et malléable, étrange et familière, désirable. Originelle, elle « constitue » l’écrivain « en tant qu’être pensant et parlant » [68] (comme la chair constitue le corps) et lui offre au travers de ses formes disponibles et de ses forces vives un horizon d’infinies possibilités. Aussi permet-elle une œuvre dont l’auteur reconnaît volontiers que ses romans n’y ont (comme la chair est sans limites précises) « ni commencement ni fin » [69], où les mots, les phrases, les textes, se reprennent, s’entraînent, s’enchaînent comme les vagues « arriv[ant] sans trêve du fond inépuisable de l’horizon » [70] dont le narrateur de L’Acacia contemple le jeu interminable et captivant avant de se remettre à écrire. Et si la chair importe avant tout au narrateur simonien, c’est parce qu’incommensurable et intemporelle, dynamique et disponible, comme la langue multiple à laquelle, une fois assouvie, elle peut donner accès, elle invite, inlassablement, au transport des sens.

Anne-Lise BLANC
Université de Perpignan Via Domitia
VECT-Mare Nostrum, EA 2983

Bibliographie

Simon, Claude. La Corde raide (1947). Paris, Sagittaire.
— -. Le Sacre du printemps (1954). Paris, Calmann-Lévy, 1985.
— -. Le Vent (1957). Paris, Minuit, 1985.
— -. L’Herbe (1958). Paris, Minuit, 2005.
— -. La Route des Flandres (1960). Paris, Minuit, 1985.
— -. Le Palace (1962). Paris, Minuit, 1985.
— -. Histoire (1967). Paris, Minuit, 1985.
— -. Orion aveugle (1970). Genève, Skira, coll. « Les Sentiers de la création ».
— -. Les Géorgiques (1981). Paris, Minuit, 1986.
— -. La Chevelure de Bérénice (1984). Paris, Minuit.
— -. Le Discours de Stockholm (1986). Paris, Minuit, 1999.
— -. Album d’un amateur (1988). Remagen-Rolandseck, Rommerskirschen.
— -. L’Acacia (1989). Paris, Minuit.
— -. Photographies, 1937-1970 (1992). Paris, Maeght.
— -. Le Jardin des Plantes (1997). Paris, Minuit.

Bertrand, Michel. Dictionnaire Claude Simon (2013). Paris, Champion, coll. « Dictionnaires et références » 29.

Calle-Gruber, Mireille. Claude Simon. Une vie à écrire (2011). Paris, Seuil, coll. « Biographie ».

Notes

[1Claude Simon. La Corde raide. p. 176.

[2Claude Simon. L’Herbe. p. 224

[3Ibid., p. 43

[4Claude Simon. Le Sacre du printemps. p. 255.

[5Ibid. p. 210.

[6Ibid. p. 122.

[7Claude Simon. L’Herbe. p. 252.

[8Ibid. p. 254.

[9Claude Simon. La Corde raide. p. 187.

[10Claude Simon. La Route des Flandres. p. 223.

[11Ibid. p. 226.

[12Claude Simon. Le Sacre du printemps. p. 254.

[13On trouve le même fantasme dans Le Vent où Montes rêve de s’enfouir comme un fœtus dans le corps mort de Rose. Claude Simon. Le Vent. p. 186.

[14Claude Simon. Le Sacre du printemps. p. 222.

[15Claude Simon. Le Vent. p. 76.

[16Voir Claude Simon. Photographies. De l’autre côté de la fenêtre. p. 25 ; Femme et oiseau. p. 56 ; Femme à sa toilette. p. 64 ; Peintre et modèle. p. 132 ; Femme et fleurs. p. 134 ; Modèle et chevalet. p. 135 ; Réa. p. 141.

[17Voir par exemple Ibid. Enfant et bicyclette. p. 25 ; Jeu. p. 62 ; Marseille. p. 63 ; Enfant. p. 65 ; Madone. p. 67 ; La Sainte Famille. p. 68.

[18Ibid. p. 97.

[19Claude Simon. Album d’un amateur. p. 28.

[20Claude Simon. Photographies. p. 120-121.

[21Claude Simon. Album d’un amateur. p. 32.

[22Claude Simon. Histoire. p. 110.

[23Claude Simon. La Route des Flandres. p. 29-30.

[24Ibid. 228.

[25Idem.

[26Ibid. p. 221.

[27Claude Simon. L’Acacia. p. 348.

[28Ibid. p. 29.

[29Ibid. p. 31.

[30Ibid. p. 32.

[31De très nombreux feuillets manuscrits du roman s’intitulent « Chair  » et l’on trouve dans les brouillons de l’auteur, en référence au Requiem allemand de Johannes Brahms qui s’en inspire, cette phrase de la Bible : « Là toute chair est comme l’herbe  ». Voir Mireille Calle-Gruber. Claude Simon. Une vie à écrire. p. 222.

[32Claude Simon. L’Herbe. p. 60.

[33Claude Simon. La Route des Flandres. p. 129.

[34Claude Simon. L’Herbe. p. 226.

[35Ibid. p. 143.

[36Ibid. p. 168.

[37Ibid. p. 144.

[38Ibid. p. 68-69.

[39Ibid. p. 212.

[40Idem.

[41Claude Simon. La Corde raide. p. 17.

[42Cécile Yapaudjian-Labat. Article « Mélancolie ». Michel Bertrand. Dictionnaire Claude Simon. p. 678-679.

[43Claude Simon. Le Jardin des Plantes. p. 302-303.

[44Claude Simon. La Chevelure de Bérénice. p. 15.

[45Ibid. p. 17.

[46Claude Simon. Les Géorgiques. p. 110.

[47Ibid. p. 109.

[48Ibid. p. 110.

[49Ibid. p. 110-111.

[50Claude Simon. Histoire. p. 340.

[51Claude Simon. L’Acacia. p. 348.

[52Ibid. p. 347.

[53Ibid. p. 356.

[54Ibid. p. 357.

[55Ibid. p. 358.

[56Idem.

[57Ibid. p. 367.

[58Ibid. p. 368.

[59Ibid. p. 371.

[60Ibid. p. 368.

[61Ibid. p. 369.

[62Claude Simon. Orion aveugle. p. 10-11.

[63Claude Simon. L’Herbe. p. 156.

[64Ibid. p. 157.

[65Claude Simon. Le Palace. p. 105.

[66Claude Simon. Histoire. p. 31.

[67Ibid. p. 11-12.

[68Claude Simon. Le Discours de Stockholm. p. 28.

[69Ibid. p. 11.

[70Claude Simon. L’Acacia. p. 377.