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Pugh, Anthony Cheal. Retours et répétitions dans L’Acacia (1994)

dimanche 8 avril 2018, par Christine Genin

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Texte

Référence(s)

Anthony Cheal Pugh. « Retours et Répétitions dans l’Acacia de Claude Simon ». p. 217-329, dans La Répétition. Textes réunis par Alain Montandon. Clermont-Ferrand : Publications de la Faculté des Lettres de Clermont (Littératures), 1994, 333 p.

L’Acacia [1] commence - rien de plus normal, après tout, dans un texte plus ouvertement autobiographique qu’aucun autre signé par Claude Simon (exception faite du recueil de souvenirs de 1947, intitulé La Corde raide [2]) - avec un retour en arrière jusqu’en 1919, à l’enfance du narrateur. Rien de moins proustien, cependant, que ce voyage dans le temps, car le garçon de six ans des premières pages du roman, qui sert de filtre à la narration, est présenté à la troisième personne. À peine présent à lui- même, grammaticalement parlant, il arrive avec six ans de retard sur les lieux d’un désastre général (la guerre de 1914-18), et d’un désastre plus particulier (la mort de son père). Observateur muet de la mère et de ses deux belles-sœurs dans leur quête de la tombe du père, porté disparu au cours de premiers combats en août 1914, le garçon enregistre, apparemment sans réagir. Soixante-dix ans plus tard, c’est un narrateur anonyme mais implicitement autobiographe qui se remémore cette expérience traumatisante, les brèves notations d’impressions sensorielles issues du passée étant complétées par commentaires, remarques et jugements. Comme Les Géorgiques [3] le roman est plus riche en renseignements contextuels (dates, noms de lieux) que ceux d’entre les romans prédédents où avait été abordé, plus ou moins directement, le sujet de la mort du père de Claude Simon. La critique avait remarqué l’émergence, dans Les Géorgiques, d’un discours d’auteur susceptible de menacer l’effet de distanciation voulu par l’écrivain. Dans L’Acacia une voix plus personnelle que jamais commente le spectacle de désolation qu’offrent les paysages dévastés par la guerre des tranchées.

Si discours autoritaire il y a dans L’Acacia, ce n’est pourtant pas étonnant, car depuis Le Tricheur [4] le roman simonien raconte un lent processus d’intégration psychique, où un moi dispersé en multiples avatars fictifs, partagé entre les rôles de narrateur, de scripteur et d’auteur, cherche à prendre corps dans une œuvre « authentique ». Les jounalistes littéraires ont bien sûr sauté sur l’affaire, saluant dans L’Acacia l’apparition (combien rassurante pour les lecteurs du Figaro ...) d’un Claude Simon autobiographe. Cependant, même si l’écrivain semble avoir voulu finalement reconnaître publiquement cette convergence entre identités fictives et autobiographiques (qu’à présent il ne prend plus la peine de nier), il est important de faire remarquer que convergence n’égale pas automatiquement coïncidence : dans L’Acacia, comme d’ailleurs dans tout ouvragé à caractère autobiographique, et pour d’excellentes raisons d’ordre linguistique, narratologique et phénoménologique, le sujet ne peut pas plus coïncider avec lui-même que quiconque ; qu’il le veuille ou non, le sujet écrivant est contraint de traiter de lui-même comme un autre, pour employer la formule de Paul Ricœur [5].

Retourner, en mémoire, sur des lieux empreints à tel point de significations personnelles, répéter en les développant des scènes que l’on trouve en fragments dans les romans précédents, c’était donc, de la part de Claude Simon, aller encore un peu plus loin vers la reconnaissance à la fois de l’origine de son moi et celle du processus créatif par lequel il a tenté, depuis son enfance, de réparer les blessures psychiques qui ont fini par le faire opter, après maintes péripéties, pour la carrière d’écrivain. De la part de Simon, inscrire dans L’Acacia un hommage à la mère, veuve depuis 1914, mettant pour ainsi dire des parenthèses autour de sa propre subjectivité de viellard-écrivant-redevenu-enfant, c’était également reconnaître l’importance de la « réintégration » du moi dans le texte - mais cette fois-ci en position de subordination par rapport au moi fictif, ni moi ni toi mais « lui » [6]. Rappelons que dans Histoire [7], qui raconte l’agonie de la mère, quelques années plus tard, la douleur du garçon prédominait ; ici, c’est la mère qui occupe le devant de la scène. Non seulement la mère de L’Acacia diffère-t-elle considérablement de celle d’Histoire, ou de la « bigote » que le romancier fut susceptible d’évoquer hors texte, mais, surtout, la voix narrative en parle avec respect, filialement.

Cependant, malgré ce « retour » aux sources du moi, rien dans le roman ne permet d’affirmer, de façon absolue, que c’est le garçon de 1919 que nous retrouvons dans le chapitre suivant, 21 ans plus tard, pris dans une embuscade. Le même problème se pose, bien sûr, pour l’embuscade : s’agit-il du « même » événement, dans La Route des Flandres, Histoire et Les Géorgiques ? Nous savons que l’auteur fut pris, avec les survivants de son escadron, dans une embuscade qui eut lieu le 17 mai 1940, sur une route de campagne près de la frontière franco-belge [8], mais ce qu’un lecteur éprouve, en lisant le récit d’un tel événement dans un roman n’est qu’un « effet de lecture », qui produit (ou ne produit pas) un « effet de réel », selon la qualité de l’écriture et l’existence, ou non, de références identifiables ou croyables. Mais chaque nouvelle description d’un événement « défait », ou remplace, en quelque sorte, les autres, dans un processus de superposition ou de sédimentation. En ce qui concerne l’identité du garçon, donc, seules les coïncidences ressenties par le lecteur entre le destin du père et celui du fils autorisent à relier les époques, à rapprocher les romans, et à construire le lien généalogique avec le père et « expliquer » le phénomène de la répétition. Faut-il rappeler, d’ailleurs, que pendant longtemps, pour une certaine théorie littéraire formaliste, s’autoriser à faire de telles liaisons, « interpréter » de telles répétitions ou projeter une fiction sur un fond contextuel quelconque (historique, biographique, etc.) c’était participer à un processus de duperie « idéologique », succomber à un « effet de réel » suspect (mais que nous pourrions peut-être appeler, ici, à propos de Claude Simon, un « effet d’authenticité ») ?

Aujourd’hui, nous sommes peut-être un peu moins doctrinaires, acceptant l’inévitabilité de tels effets pour qui ne s’imagine pas totalement à l’extérieur des systèmes culturels et linguistiques dans lesquels fonctionnent œuvres littéraires anciennes et modernes, traditionnelles et « nouvelles ». Mais non pas au point de nier que toute assimilation d’effets de lecture produits par un texte de fiction et de détails biographiques rendus publics - avec ou sans l’autorisation de l’auteur - demeure la responsabilité finale du lecteur, ou de ces lecteurs et lectrices plus ou moins réels, plus ou moins idéaux, auxquels s’intéressent, depuis quelques années, les théoriciens de la lecture littéraire.

Il faut donc décider si L’Acacia, considéré dans le contexte général de sa réception - c’est-à-dire prenant en considération les textes journalistiques, critiques et publicitaires qui l’entourent depuis sa publication - peut se lire autrement que comme une autobiographie. Et si notre réponse est « oui, bien sûr, on peut le lire autrement », ce n’est pas la conséquence d’une décision arbitraire, parce que c’est le texte lui-même qui nous oblige à adopter cette « double » perspective de lecture, le recours à la troisième personne permettant de maintenir la distinction, parfaitement réversible, entre roman autobiographique et autobiographie romancée. Du coup, le moi peut être un autre, et l’autre le moi. D’où une évidence (importante pour la lecture des romans de Claude Simon, qui aime maintenir ce type d’ambivalence, déclarant tour à tour, par exemple, à propos de La Route des Flandres, que tout était vrai et que tout était inventé) : en réalité, nul ne saura jamais combien le brigadier de 1940 réincarné dans le roman (une représentation, ou, mieux, un représentant : une présence imaginaire) diffère du modèle (un représenté : cet absent que le créateur tâche de faire revenir en alignant des mots sur le papier) [9].

Lire et lier, relire et relier, faire la liaison : c’est pourtant ce que le lecteur habitué aux romans de Claude Simon sait déjà faire, depuis longtemps. Au point, peut-être, de ne pas remarquer quelques-uns des trous textuels qu’il enjambe si lestement dans son désir de relier l’inconnu - le nouveau texte - au re-connu : le monde de La Route des Flandres, d’Histoire et des Géorgiques (pour ne mentionner que les romans « pratiquement autobiographiques » les plus célèbres). Quant au lecteur nouveau, les dates qui servent de titres aux chapitres successifs du roman le guideront en amont et en aval du temps et du texte, tandis que celui-ci juxtapose les époques et recompose les expériences du brigadier anonyme qui, à la différence du père dont il se croyait condamné à répéter le destin, survit à la guerre, défie l’Histoire et prend l’habitude, dans ses écrits, de se moquer de ses prétendues « lois ». S’en moquer, parce que l’auteur qui se profile derrière le narrateur implicite sait, après avoir passé 50 ans à écrire des romans, qu’aucune autre attitude ne permet de se garantir contre les effets d’ironie constitutifs à la fois du récit romanesque, du récit historique, et de la vie des individus, dans la mesure où le discours des hommes en traite, le plus souvent, sous forme de récits plus ou moins bien répétés (c’est-à-dire rejoués, comme une œuvre musical ou une pièce de théâtre) et recomposés par un processus quasi obsessif de réecriture.

Conscient du fait que la position d’auteur (celui qui sait ce qui va se passer et qui connaît les règles du jeu) est essentiellement et inévitablement ironique, les narrateurs simoniens, délégués de l’écrivain, cultivent donc l’ignorance et l’oubli : c’était déjà la stratégie employée dans Le Vent (1956) [10], cette histoire racontée par un idiot, plein de bruit et de fureur, ne signifiant rien. La même technique est caractéristique également de la période moyenne, où l’auteur questionne plus directement le lien entre Histoire et destin, rapport que son art de romancier - de fabricant de récits et donc de destins fictifs - ne cesse de rendre à la fois confus sur le plan philosophique et attractif sur le plan esthétique. La différence, c’est qu’avec La Route des Flandres, Le Palace et Histoire, il s’approche de plus en plus près de sa propre histoire, courant par conséquent le danger de ne plus faire la différence entre la tromperie nécessaire au bon fonctionnement du récit de fiction (sanctionnée par les multiples ambiguïtés inhérentes à la traditionnelle esthétique réaliste) et les ruses du récit d’histoire (que le positivisme historiographique, soucieux de véracité, rend obligatoires). Mais la priorité accordée à l’originalité et à l’authenticité dans la tradition autobiographique ne fait que rajouter à l’ambivalence des récits simoniens, au fur et à mesure qu’ils cernent de plus en plus près l’histoire personnelle de leur auteur. C’est qu’à l’instar de nombreux écrivains de la modernité Claude Simon a toujours exploité au maximum les contradictions inhérentes à la position idéale de l’artiste, « peintre de la vérité », car poser constamment le problème de la véracité du récit, c’est permettre constamment au texte de digresser, de perdre de vue la nécessité de raconter et de faire progresser l’anecdote, et à retrouver ainsi le mode descriptif où le stylo du romancier est le plus à l’aise.

Ainsi l’écriture simonienne retrouve-t-elle, toutes les fois que l’opportunité se présente, un mode plutôt descriptif que narratif, aux dépens de la logique du récit, niant toute immanence, déférant toute signification finale aux actes ou aux événements racontés : si un ordre semble se cacher derrière le décor ou à l’intérieur de la débâcle, ou si une valeur transcendantale semble émerger du chaos d’images, c’est seulement parce qu’un personnage, un narrateur, ou tout simplement « l’opinion générale » cherche à réconcilier deux réalités totalement distinctes - celle des phénomènes et celle des explications et des représentations des phénomènes : la science, la philosophie, la peinture, le roman.

Depuis Le Vent, l’écrivain continue donc de jouer le jeu du roman et de l’anti-roman, traditionnel depuis au moins le 17e siècle, parce que, comme tout romancier sensible aux problèmes philosophiques que pose son art, il entend entretenir jusqu’au bout une antithèse fiction-réalité très productive sur le plan esthétique. Désespérés, déçus, ses narrateurs paraissent désireux de dissoudre cette antithèse (absolue depuis Kant), multipliant ressemblances, analogies, comparaisons et rapports métaphoriques entre phénomènes et représentations. Mais ce n’est qu’un prétexte : réconcilier facticité et fiction, ce serait détruire le fondement même à la fois de l’art pictural et de l’art romanesque ; ce serait tout réduire au même et rendre incompréhensible toute répétition. Peu importe si la description de ce qu’appréhende le sujet, dans un texte de philosophie (par exemple Merleau-Ponty, ou Sartre) diffère peu de ce qu’éprouve un narrateur simonien : prétendre représenter fidèlement le réel, ce serait admettre que l’art de la re-présentation et du retour sur soi n’avait plus de raison d’être.

Quoique tenté pendant tes années soixante-dix par une esthétique de la description pure (de répétition de la nature, en somme), c’est l’art de collage d’un Rauschenberg, qui dépend en grande partie de la mise en relief des différences entre la texture, la forme et même le sens des composantes, plutôt que la technique du simulacre d’un Warhol, qui continuait d’attirer le romancier, toujours attentif à maintenir une tension maximale entre surface et profondeur, texture et telos. C’est que le jeu du Même de l’Autre, principe de l’esthétique romanesque occidentale, est encore au cœur de l’entreprise romanesque moderne ; seulement, chez les modernes, il prend des formes de plus en plus baroques (Borgès, Calvino, John Barth, Robbe-Grillet), pouvant fonctionner à merveille, indéfiniment même, tant que le sujet écrivant ne se met pas directement en question. Cependant, mis sur la sellette par la tentation constante du procès analogisant et par la dynamique du langage, inhérents au mot à mot de la fiction, le sujet simonien finit parfois par se confondre avec ses doubles, au point de ne plus y retrouver son latin : c’est le cas du narrateur d’Histoire, qui, mauvais écolier, doit demander l’aide, pour traduire César, du même oncle sur qui il projette, adulte, le sentiment de culpabilité qui le travaille et qui anime d’un bout à l’autre du texte, ce roman si personnel et pourtant si discret. Du neveu ou de l’oncle Charles, du « je » ou du « il », le lecteur n’apprend jamais qui est le mari adultère responsable du suicide mystérieux de la jeune femme qui se jette du cinquième étage d’un immeuble. Egaré par la multiplicité de descriptions et de digressions, le lecteur, à l’instar du narrateur malheureux, se laisse consoler par le spectacle à la fois magnifique et terrifiant d’un monde voué au désordre et destiné à retrouver, plus ou moins vite, son état originel : le chaos.

La relation d’ambiguïté catégorielle et constitutive qui nourrit la machine romanesque finit cependant par faiblir, et pendant la période qui va des Corps conducteurs [11] à Triptyque [12], c’est la notion de la fiction pure, idéal formaliste aussi peu réaliste que l’idée d’un réalisme où tout serait « vrai », qui reprend le dessus. Ce n’est qu’avec Les Géorgiques que l’auteur retrouve sa voie/voix, et réussit à créer, comme dans La Route des Flandres, un équilibre - souvent précaire - entre histoire et mythe, personnages empruntés (« Georges », qui figurait déjà dans L’Herbe) et personnages inventés (« Blum », « Wack »), sans parler de généraux anonymes mais identifiables (Barbe, qui se suicida après la bataille) ou de colonels et capitaines plus ou moins déguisés (de Ray, Cuny). Plus incestueux qu’antinomique, le rapport entre histoire et fiction dans ce roman explosif se maintient en se minant, et ce n’est que par la généralisation de l’ironie que le romancier arrive à garder son équilibre au-dessus du vide qu’il creuse à force de vouloir évoquer ce qui n’existe plus : le passé en général, un général en particulier, un régiment, une armée. Comme je l’ai démontré dans un essai sur l’Histoire en tant que « figure » (visage et trope) dans Les Géorgiques [13] où sont reprises certaines scènes capitales de La Route des Flandres, une sorte de vertige s’ensuit : comme le roi de France, l’Histoire est détrônée et perd la tête ; les événements « historiques » sont présentés comme l’œuvre d’un dieu fou. Le narrateur, effaré, dépassé par sa propre imagination, laisse faire à la narration qui, prise dans la même spirale temporelle, fascinée par le jeu des coïncidences, des ressemblances et des analogies, s’affole aussi. Le buste du Général, symbole du solide, point de repère inamovible dans le chaos des transformations historiques, emblème patriarcal garantissant l’unité et la continuité de la famille, est vendu et finalement perdu. Dorénavant c’est l’image d’un corps acéphale qui domine le texte, symbole de la défaite de la raison et de la folie des hommes. Et c’est là que le narrateur simonien commence à comprendre comment la répétition, jusqu’ici principe négatif, peut se transformer en valeur opposée, en possibilité de paix et de réconciliation : consolé et bercé par le rythme du retour des saisons, le vieux général d’Empire, double du narrateur/scripteur vieillissant, apprend à accepter la mort de sa jeune femme et la fin abrupte de sa glorieuse carrière dans l’armée napoléonienne. Arrière-arrière-petit-fils du général, le romancier multiplie dans un procès vertigineux de convergences et de substitutions les ressemblances entre le destin de son ancêtre et celui de son propre père, l’aventure espagnole de l’écrivain anglais ’O’, et les expériences du brigadier de 1940. C’est l’avènement du Même et de la « généralisation », certes, mais est-ce pour autant la capitulation d’un grand écrivain devant la tentation de la recapitulation infinie ? Répétition - ou approfondissement ? Ressassement - ou enrichissement ? Ce sont les questions que la critique doit poser à l’œuvre simonienne de la troisième période, et du troisième âge de l’auteur.

Il s’agit donc de situer L’Acacia dans la problématique générale de la répétition, et donc de la différence. Pour ce faire, il est nécessaire de revenir, maintenant, à la question de l’identité - trop rapidement résolue tout à l’heure - du petit garçon de 1919. Qu’est-ce qui nous permet, une fois de plus, de dire qu’il s’agit, dans le premier et dans le deuxième chapitre du roman, de la « même » personne, ou de conclure que cette personne est aussi le personnage principal du roman, à la fois l’étudiant de 26 ans qui voyage en Russie en août 1939, le réserviste rappelé à son régiment peu après, le brigadier de 1940, le prisonnier de guerre, et finalement, l’espèce de fantôme qui, après son évasion, rejoint ses vieilles tantes dans la maison familiale de Perpignan ? Celui qui découvre les cartes postales d’Histoire, celui qui scrute les papiers du général Lacombe St Michel, et celui qui retrouve le chemin du bordel, après son évasion, sont-ils vraiment la « même » personne ?

De nouveau, rien d’explicite ne permet de telles liaisons et rapprochements à part une certaine expérience de lecture où joue le phénomène de la reconnaissance, expérience qu’on pourrait appeler du déjà vu - étant donné la primauté, chez Simon, du visuel - mais qu’il serait plus à propos de décrire comme du « déjà lu ». Autrement dit, en composant la série de romans qui lui ont valu en 1985 le prix Nobel de littérature, et en y mettant, semble-t-il, le point final en 1989 avec L’Acacia, Claude Simon a su effectuer, vis-à-vis de ses lecteurs les plus fidèles, une sorte de contre-transfert : ayant appris à lire les romans des années 1960 et 1970, réputés « difficiles », et ayant assimilé ainsi une foule d’expériences virtuelles, le lecteur, séduit à l’avance, programmé, possédant une mémoire textuelle plus ou moins précise, se laisse une fois de plus aspirer dans un monde familier, où une famille bourgeoise devient petit à petit une dynastie romanesque. Expérience qui, sans doute, rebute une certaine catégorie de lecteurs pour qui chaque roman (ou ’novel’) doit effectivement raconter du nouveau. Et pourtant, quoi de plus classique, dans le pays de Balzac et de Zola, que le « retour des personnages » ? Quoi de plus moderne, également, que la destruction et la réinvention des personnages (jamais tout à fait les mêmes...), qu’ils s’appellent Georges ou ‘O’, Murphy, Molloy ou Malone - sans parler de l’increvable Mortin et l’intarissable Monsieur Songe de cet autre écrivain de Minuit, si inventif (mais si peu autobiographique), Robert Pinget.

Claude Simon n’a manifestement jamais cessé de retravailler la « même » matière familiale - mais toujours de façon différente. Malgré l’anonymat qui entoure le personnage du garçon dans L’Acacia, le lecteur l’assimilera donc automatiquement à celui d’Histoire - en dépit de l’absence, dans le texte, de ces signes conventionnels (des noms) qui, habituellement, nous autorisent à re-connaître les personnes que nous rencontrons dans les fictions.

Dans la période du « nouveau roman », on ne posait même pas ce type de question, d’autant plus que ni textes ni auteurs semblaient encourager les lecteurs à voir, dans les personnages romanesques, autre chose que des « faux portraits de personne » (Lucien Dällenbach). C’est le cas d’Histoire (1967), où « je » et « il » deviennent interchangeables, et où le thème de la quête du père ne se profile qu’à travers des représentations partielles qui surgissent dans le texte, appelées par associations et lapsus, ce qui indique l’existence d’une zone interdite ou indicible à peine accessible à la levée des barrières entre le Moi et le Lui qu’il recèle. C’est que la réalité de la mort du père (le père réel, dont le corps ne fut jamais retrouvé) est encore purement psychique. En plus, dans Histoire, la quête de la tombe est manifestement liée à la crise d’identité, typique de l’âge moyen, que traverse le narrateur ; tout retour à ce lieu sacré (d’autant plus sacré qu’il est introuvable) est essentiellement imaginaire.

En fait, L’Acacia reprend non seulement des images d’Histoire, mais des pages écrites cinquante ans plus tôt, dans Le Tricheur, où, sous couvert du personnage de l’orphelin délinquant Louis, le tricheur du titre, Claude Simon avait tenté pour la première fois de décrire quelques-uns de ses premiers souvenirs. Remarquons aussi qu’un seul phonème fait la différence entre « Louis » et « lui », le garçon anonyme du roman de 1989, de même que seule une lettre (que l’on n’entend pas) sépare « nom » de « non ». Et si le sujet n’a pas de nom dans L’Acacia c’est sans doute parce que le travail d’un demi-siècle a démontré que malgré le phénomène de la répétition, et malgré la levée graduelle des écrans qui protégeaient le moi de l’écrivain de ce que son inconscient savait depuis toujours, lui fournissant malgré lui ample matière à écrire, tout retour dans le passé était impossible pour la simple raison que cet « autre », ce « lui », n’existait plus.

Histoire et roman : c’est comme si, à force de conjuguer les verbes au passé (historique), nous avions oublié que tout ce qui se passe se passe maintenant, que le passé en tant que tel ne peut se concevoir en dehors de son rapport au présent. Comme le dit si bien Gilles Deleuze, l’actuel présent « se réfléchit en même temps qu’il forme le souvenir de l’ancien présent » [14] . Et c’est précisément ce que reconnaît l’écriture simonienne, depuis au moins Le Palace [15] : qu’on ne peut faire « comme si » le garçon qui fut pouvait revenir et revivre dans l’homme qui se souvient maintenant (Deleuze : « [C]e qui est représenté, c’est toujours présent, comme ancien ou actuel » [16] .) Dans les béances du moi qui se représente à travers ses autres se glissent constamment des représentations qui paraissent venir directement du passé, mais c’est à l’éternel présent de l’inconscient, l’éternel retour du même, que nous avons à faire.

Est-ce pourquoi le lecteur de L’Acacia donne l’impression que le garçon, qui semble s’éveiller pour la première fois dans le paysage cauchemardesque des champs de bataille de la guerre de 1914-18, naît pour ainsi dire par section césarienne, brutalement extirpé de la tiédeur du ventre maternel par le spectacle d’un monde que les hommes, dans leur folie, ont d’abord fait, et ensuite défait ? Jusque-là, ses horizons ne s’étendaient pas plus loin que les jupes d’un trio de femmes quasi interchangeables (la mère et ses deux belles-sœurs). Dans le roman, « elles » forment un groupe que l’emploi répété du pronom et un passage où leurs visages sont comparés à ceux de « gisantes sculptées dans la pierre » ont tendance à figer en personnage composite représentant la douleur, la dignité et une obstination tout aussi folle que la fureur destructice des hommes. Obstination qui les pousse à retrouver l’endroit où tomba le père du garçon, au tout début de la guerre, cinq ans auparavant.

Ici, comme tout au long des premières pages du roman, la répétition joue un rôle essentiellement musical, pronoms, passés simples, conjonctions et participes présents plaqués sur la page les uns après les autres comme les accords aigus et dissonants des cuivres qui accompagnent le rythme monotone mais grandiose des tambours dans la Symphonie funèbre et triomphale de Berlioz. C’est comme si le style simonien, si souvent essoufflé par le besoin de courir plus vite que la musique, sentait le besoin de marcher au ralenti, tandis qu’il accompagne le cortège de femmes dans leur longue tournée à travers les charniers de la grande guerre :

Elles couchèrent un soir dans le dortoir d’un couvent (ou d’un collège de filles) où les lits étaient séparés par les rideaux de toile blanche pendant à des tringles. Elles couchèrent une fois dans un café (...) les deux femmes étendues sur des banquettes ou des chaises, la veuve et le garçon sur le billard, à même le drap vert, la veuve retirant seulement son chapeau, pliant le voile qu’elle posa en coussin sur son sac dont elle avait fait un oreiller au garçon qui s’endormit au contact rugueux et rêche du crêpe, pouvant sentir son odeur, comme rêche elle aussi, et le pesant corps de pierre étendu le long du sien. (L’Acacia, p. 13)

Tout comme la magnifique description de la marche forcée dans la neige par laquelle commencent Les Géorgiques, le premier chapitre de L’Acacia constitué un « admirable exercice de lenteur » [17] en parfait accord avec l’extrême gravité de son sujet, où la reprise de certains motifs descriptifs et le retour de thèmes anciens nous rappellent que si le texte est répétitif, c’est parce qu’il décrit déjà le monde du « moi dissous », ou règne la tierce personne, dans la « splendeur », tout ironique, du « ON » infiniment reproductible [18]. Le garçon n’a ni nom ni voix parce que ce qui se représente ici n’est pas un passé d’auteur, révélé dans un moment privilégié de type proustien, mais ce que le temps de la mémoire et de l’oubli, travaillé par l’écriture, en a fait, mélangeant une matière première toute personnelle à d’autres données. Le passé personnel de l’auteur est en effet passé dans cet « ordre de la généralité » que Roger Dragonetti décrit, à propos des Géorgiques, comme « cette puissance signifiante qui ouvre le particulier à des symbolisations multiples, tenues ensemble par un rythme dont le réel demeure hors d’atteinte » [19].

Dans la troisième période du roman simonien, le Temps comme catégorie du quotidien (Histoire est le récit circulaire d’une seule journée) n’existe plus : remplacé dans Les Géorgiques par le cycle répété des saisons et la répétition des destins individuels, le Temps est devenu principe de répétition infinie. La mort des rois, l’indifférence des dieux, le suicide des philosophes et même, au début de L’Acacia, l’absence du soleil, tout concourt à réduire Temps, Histoire et vie individuelle à des manifestations de l’ironie universelle. La Révolution s’est avérée processus circulaire, répétition ironique du même. La mort du père, le suicide collectif des puissances industrielles qui se révèle n’être qu’un jeu cruel, destiné à re-nourrir la machine économique, et, peu après, la venue des systèmes totalitaires, achèvent de réduire le temps réel à un stéréotype, la vie à une mécanique qui se défait plus ou moins vite, et 1e corps à une « machine » qui peut s’arrêter n’importe quand. L’expérience individuelle, condamnée par la loi du retour du refoulé à la répétition des destins, se dissout dans la généralité ; tout devient masque, tout se révèle simulacre.

Mais pour l’écriture simonienne, c’est la confirmation d’une vérité : le récit n’a jamais été à la hauteur des tâches que lui ont assignées historiens, romanciers et moralistes (selon Simon, ces rôles coïncident ou se superposent dans tous ces genres). Il (le récit) n’a jamais fait que reproduire le discours par lequel les hommes ont cru maîtriser le temps ; en réalité, les récits ne peuvent représenter que des fragments d’un passé qui fait partie du présent. Le reste est mélodrame et rhétorique. En attente comme le chat prêt à bondir de L’Herbe [20], ou en mouvement perpétuel, comme la flèche immobile de Zénon (Valéry, « Le cimetière marin », cité en épigraphe dans La Bataille de Pharsale [21], le temps ne se saisit pas. Au cœur d’une expérience réduite à la notation de phénomènes empiriques, la conscience qui observe et décrit ses effets se trouve toujours en avance ou en retard sur l’événement.

Le temps ne se raconte donc pas ; on ne peut qu’en décrire les traces : sur le sol, sur les cartes, dans les textes - et dans la mémoire, individuelle et collective. Au terme d’une lente exploration de ses effets dans un présent où le moi n’est jamais identique à soi, Simon serait ainsi d’accord pour dire, avec Deleuze, que « [L]e passé n’est pas l’ancien présent lui-même, mais l’élément dans lequel on vise celui-ci », et, à plus forte raison, que « le fondement du temps, c’est la Mémoire » [22]. En effet, relire maintenant Différence et répétition, c’est retrouver, point par point, toute la problématique de la temporalité dans les romans de Claude Simon, une problématique où la question de la répétition et de la réécriture se pose partout, c’est-à-dire pas seulement depuis Les Géorgiques, où, selon certains, Simon aurait « tout remis en question ». En réalité, la question du temps et de notre façon de le vivre n’avait jamais cessé de le préoccuper, même pendant la période du « nouveau nouveau roman » où, sous l’influence de Jean Ricardou, la description et la recherche de combinatoires formelles semblaient l’emporter sur son obsession majeure, le rapport entre Eros, Thanatos et Mnémosyne.

Voilà donc, en quelques lignes, pourquoi je proposerai ici, pour terminer, quelques distinctions qui nous permettront peut-être de mieux comprendre (1) la fonction de la répétition dans L’Acacia, d’abord au niveau d’une première lecture, et (2) la signification plus générale de la répétition dans le cadre de l’interprétation de l’œuvre entière de Simon, considérée non comme autant d’ouvrages discrets, mais comme un texte continu où se représente un « tissu mental » peut-être dissous et fragmenté, mais unique et reconnaissable quand même. Ce faisant, je propose d’essayer d’éclaircir, à propos des romans autobiographiques simoniens, la question rituelle, et pourtant capitale, à laquelle je n’ai pu donner jusqu’ici qu’une réponse très générale : « qui parle ? ».

Retournons donc au début, et de L’Acacia, et de notre propos : l’éveil, dans les premières pages du texte, d’un sujet romanesque. Bien que la conception et la naissance littérales du narrateur soient retardées (description de la mère enceinte, p. 147), on assiste à une naissance symbolique et violente. Un enfant, jusque-là protégé du réel, élevé dans un monde de femmes, est projeté directement dans l’horreur d’un paysage transformé par la mécanique de la guerre moderne en un tableau qui ne peut se décrire que sur le mode de la généralité et du répétitif :

Il pleuvait sur les pans de murs des maisons éventrées dont les papiers aux couleurs pastel se décollaient peu à peu, il pleuvait sur la surface unie, grise et lente de la rivière où les gouttes faisaient éclore de petits ronds argentés, il pleuvait sur le paysage grisâtre, le cercle de collines sous lesquelles achevaient de pourrir les corps déchiquetés de trois cent mille soldats, sur les champs grisâtres, les maisons grisâtres - ou plutôt ce qu’il en restait, c’est-à-dire comme si tout, collines, champs, bois, villages, avait été défoncé ou plutôt écorché par quelque herse gigantesque et cahotante, aux dents tantôt écartées, tantôt rapprochées, ne laissant subsister derrière elle rien d’autre que quelques pans de mur et quelques hones d’arbres mutilés, tantôt une maison ou un groupe de maisons (ou un arbre, ou un groupe d’arbres) intacts, insolites, autour (ou à partir) desquels semblait sourdre au ralenti comme une sorte de vie larvaire ou plutôt élémentaire, morne, comme hébétée, en deçà et au-delà d’une zone où pas un arbre, pas une herbe, sauf des bouquets d’orties, n’avait repoussé, où pas un champ n’avait été ensemencé, où la pierre n’existait qu’à l’état d’informes amoncellements et où le sol n’était qu’une succession de cuvettes plus ou moins larges, empiétant les unes sur les autres, emplies d’une eau croupie, et dont s’élevaient des nuées de moustiques. (L’Acacia, p. 19-20)

L’enfant n’étant plus, il s’agit ici d’un retour au moins double : au passé actuel de celui qui se souvient, et à une zone mémorielle encore plus concrète - celle des écrits précédents. Mais ce n’est pas tout, car déjà, dans le passé de la représentation (le roman débute en 1919) c’est le commencement d’un voyage en amont du temps, jusqu’au 27 août 1914, jour où mourut le père du garçon. Retour aussi en deçà de sa conception, jusqu’aux fiançailles des parents. Et ainsi de suite : un retour sinon étemel, au moins infini, qui ne cesse de se répéter, car il s’agit de découvrir, à travers ces textes qui se chevauchait, l’origine de ce moi muet qui, dans les romans de Simon, n’a jamais pu parler qu’à travers doubles et substituts.

On pourrait, bien sûr, avancer une explication plus « technique » pour le silence du garçon ; fonction du récit, être de papier : ce ne serait qu’une conscience sans épaisseur psychologique servant seulement d’optique grossissante à travers laquelle sont focalisés les récits concernant la veuve et ses belles-sœurs. Mais ce procédé de distanciation par lequel, linguistiquement, le garçon muet est mis hors circuit sert aussi à libérer d’autres voix. Même pas celui dont on parle (il est comme invisible), il devient celui à travers qui parle l’autre (ou les autres) qu’il est devenu, narrateur implicite, scripteur, autobiographe, auteur : celui qui, par le moyen de l’écriture, a bricolé et recollé toutes ces choses entendues, lues et remémorées, en inventant d’autres, au besoin, pour colmater les trous dans le tissu qu’il fabrique.

C’est donc déjà, malgré l’allure apparemment conventionnelle de l’écriture dans ce roman réputé être nettement plus « lisible » que les autres, une situation assez complexe, car quel que soit le mode de lecture que l’on adopte, le motif du retour à l’enfance recouvre toute une série de mouvements analogues au long du roman. On ne peut donc pas dire que dans L’Acacia il y a un simple « retour » à l’autobiographie, parce que l’écriture simonienne serait toujours partie de l’expérience vécue. Simon a beaucoup de choses à raconter, mais entend continuer de les raconter et, qui sait, à les broder, à sa manière, sans jamais se nommer, gardant ainsi ouverte, toujours, la fameuse question « qui parle ? », car avec le temps, les voix se superposent, s’interrogent, et parfois, se répondent : le moi, le soi, l’Autre, les autres, les fantômes familiaux, les personnages historiques - ou même les lecteurs et critiques avec qui il lui est arrivé de dialoguer. Nous avons déjà démontré pourquoi cette réticence (ou jeu de cache-cache) qui résulte à la fois d’une discrétion toute caractéristique de l’homme mais aussi d’un sens aigu de la stratégie sur le plan technique et esthétique, est si productive au niveau de l’interprétation. Il est de première évidence, en tout cas, qu’il s’agit ici d’une histoire extrêmement pénible à raconter (la mort du père), que l’auteur n’a pu ou n’a su aborder ouvertement qu’à l’âge de 75 ans. Il l’avait commencée en 1939 (ou avant, dans un roman qu’il a détruit) dans Le Tricheur (publié seulement en 1945), mais il fallait attendre qu’il ait appris l’art d’écrire, et que le public ait appris à lire sa prose, avant de se permettre de la reprendre à nouveau.

Notes

[1Éditions de Minuit, 1989.

[2Éditions du Sagittaire, 1947.

[3Éditions de Minuit, 1981.

[4Éditions du Sagittaire, 1945.

[5Soi-même comme un autre, Éditions du Seuil, 1990. Voir également notre article « Claude Simon and the question of autobiography », Romance Studies, 8, 1976, pp 137-160.

[6L’approche esquissée ici s’inspire des travaux du psychanalyste D. Anzieu sur la création littéraire, en particulier Le Corps de l’œuvre, Gallimard, 1981.

[7Éditions de Minuit, 1967.

[8Voir notre article « Claude Simon et la route de la référence », Revue des sciences humaines, 220, 1990, p. 23-45.

[9oir le chapitre intitulé « À cheval sur l’histoire et la fiction : Claude Simon en l’an quarante », dans France 1940 : Literary and Historical Reactions to Defeat, Durham French Colloquies No. 3, Durham Modern Language Series, 1991, p. 91-106, ed. A C. Pugh.

[10Éditions de Minuit, 1956.

[11Éditions de Minuit, 1972

[12Éditions de Minuit, 1975.

[13« Facing the matter of history : Les Géorgiques, in Claude Simon, New Directions, ed. A. B. Duncan, Edinburgh, Scottish Academic Press, 1986, p. 113-130.

[14Différence et répétition, P.U.F., 1972, p. 109-110.

[15Éditions de Minuit, 1962.

[16Deleuze, p. 112.

[17Deleuze, p. 112.

[18L. Dällenbach, Sur Claude Simon, Editions de Minuit, 1987, Editions de Minuit, 1957, p. 143.

[19Deleuze, p. 4.

[20Ibid, note 17.

[21Éditions de Minuit, 1987.

[22Deleuze, p. 108.