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Cahiers Claude Simon, 11, 2016

dimanche 22 mai 2016, par Christine Genin

Relire L’Acacia
Cahiers Claude Simon, 11, 2016
Sous la direction de Joëlle Gleize et David Zemmour

 lire le numéro 11 sur OpenEdition

 sur le site des Presses universitaires de Rennes

Avant-propos (extraits)

Faire lire Claude Simon d’une lecture toujours plus sensible, plus aiguë, plus large – de toutes les lectures possibles. tel est le but assigné dès le départ à ces Cahiers, en 2005, par Dominique Viart, fondateur de la jeune Association des Lecteurs de Claude Simon (née en 2003) et le premier directeur de la revue, Jean-Yves Laurichesse. Tel est encore le but d’Anne-Yvonne Julien, qui en 2010, accepte de poursuivre le travail accompli et l’enrichit de manière significative : introduction d’une section iconographique et, pour se conformer aux critères internationaux de l’exigence scientifique, instauration de la double lecture en aveugle des manuscrits soumis à publication. C’est aussi sous sa direction et grâce à son efficacité que s’effectue un changement majeur : ce sont les Presses universitaires de Rennes qui, depuis 2014 et le numéro 9, publient les Cahiers Claude Simon. Vu l’ampleur de la tâche accomplie par nos prédécesseurs, nous ne serons pas trop de deux pour prendre le relais. Leur objectif initial est désormais le nôtre : la voie est tracée, il suffit de continuer …
Nous présentons donc à tous les lecteurs des Cahiers Claude Simon un volume dont l’architecture ne les surprendra pas : la réédition d’un entretien de Claude Simon publié dans la presse grâce à la générosité fidèle de Réa son épouse, un dossier critique issu des séminaires de l’association, la publication d’archives, un cahier iconographique qui bénéficie dans une large mesure de l’exceptionnel fonds Claude Simon de la Bibliothèque littéraire Jacques-Doucet, enfin les deux rubriques sur la réception de l’œuvre : ouverture sur les lectures de Simon à l’étranger, avec le premier volet d’une étude de « la réception critique dans le monde anglo-saxon » par Ilias Yocaris, comme sur celles d’un écrivain contemporain, ici Maylis de Kerangal. Enfin la rubrique d’informations sur l’actualité de l’œuvre.
Cependant dix années ont passé et une revue est contrainte de s’adapter, d’évoluer en fonction de ses lecteurs et des mutations que connaissent les modes de diffusion de la littérature et du savoir. Pour relever ce qu’il est convenu d’appeler le défi numérique, la revue doit se rendre accessible sur la toile tout en préservant la primauté du support papier. C’est pourquoi nous travaillons actuellement à la numérisation des anciens numéros avec l’objectif de les mettre en ligne en accès gratuit à l’horizon 2017, les nouveaux numéros ayant quant à eux vocation à être disponibles un an après la parution du volume papier.
(…)
Le lecteur fidèle remarquera quelques légères modifications dans cette livraison des Cahiers : nous avons ouvert une rubrique de comptes rendus d’ouvrages consacrés en 2015 à l’œuvre de Claude Simon, complément aux données informatives présentées par le site de l’association. Avec le même souci de fournir au chercheur comme au lecteur curieux des synthèses permettant d’approfondir la réflexion sur l’œuvre, nous présentons aussi la mise au point de Ian de Toffoli sur les relations de Simon au latin et à la culture latine.
Nous avons voulu – la thématique des séminaires s’y prêtait – unifier la matière du dossier critique en consacrant la majeure partie du numéro à L’Acacia, roman-seuil, roman-somme aussi. Cette « fiction d’un sujet dans et après le désastre », d’un sujet partiel et fragmentaire, raconte la naissance d’un écrivain, celui qui ne peut retrouver un peu de son unité perdue que dans l’écriture, et qui, de reprise en reprise, depuis Le Tricheur jusqu’à L’Acacia, donne forme (syntaxe, ponctuation et rythme) à la dispersion et à l’anéantissement qui sont au cœur de son expérience de la guerre.

Joëlle Gleize et David Zemmour

 tout l’avant-propos en pdf

Sommaire

Relire L’Acacia

Entretien avec Claude Simon. « Et à quoi bon inventer ? », p. 19

Marianne Alphant. « Le requiem acacia de Claude Simon », p. 25

Hannes De Vriese. « L’Acacia, 25 ans de critique », p. 27

L’article propose un bilan de 25 années d’analyses de L’Acacia pour constater que ce roman marque une inflexion de la critique vers les questions de l’autobiographie et de la référentialité, sans perdre de vue les apports du formalisme et de l’héritage textualiste.

This article reviews the critical reception of L’Acacia over the last 25 years. Analyses of the novel have veered towards questions of autobiography and referentiality without losing sight of what was contributed by formalism and textuality.

Ralph Sarkonak. « Un drôle d’arbre : L’Acacia de Claude Simon », p. 53

Le titre du roman L’Acacia est hautement métaphorique. Il ne désigne pas simplement un arbre, mais un motif spéculaire, en l’occurrence une certaine forme d’arborescence qui permet de rendre compte de l’œuvre à différents niveaux : celle des arbres de famille au sein de la diégèse, celle des phrases et autres unités transphrastiques sur le plan de l’écriture, celle enfin de l’engendrement intertextuel, qui donne lieu à des ramifications sans fin au niveau de l’ensemble de l’œuvre simonien.

L’Acacia is highly metaphorical. It does not only designate a specific tree, but a mirror motif, namely, various forms of arborescence that allow us to understand the work at different levels : the arborescence of family trees in the fiction, that of the sentences and other larger units in the narration, and finally that of intertextuality, which leads to ramifications without end to the whole of Simon’s œuvre.

Patrick Suter. « L’Acacia comme autoportrait », p. 81

Si L’Acacia est sous-titré « roman », on peut y repérer une matière autobiographique, mais il serait faux de le considérer comme une autobiographie. À ce terme, on préférera celui d’« auto-portrait », tel qu’il a été proposé par Michel Beaujour dans Miroirs d’encre, genre dont l’écriture est discontinue, topo- et non chronologique, et fonctionne par l’exploration de « lieux de retour ».

If the Acacia is subtitled « novel », however one can notice its autobiographical material. Still, it would be wrong to categorize it as an autobiography. Hence, it is better to speak of a « self-portrait », as proposed by Michel Beaujour (Poetics of the Literary Self-Portrait)
, a genre characterized by its discontinuous, topo- and not
chronological nature whish runs through the exploration of « Return places ».

Cécile Yapaudjian-Labat. « Mémoire de l’épopée dans L’Acacia de Claude Simon », p. 97

Si l’on n’écrit plus d’épopées de nos jours, Claude Simon dans L’Acacia convoque pourtant le genre et le registre épiques. Il met en scène la guerre, s’arrête sur des motifs traditionnels du récit épique (le départ du guerrier pour la guerre, la mort du héros). Mais le plus souvent, la référence épique – la figure du héros – fait l’objet d’une dépréciation. Cette critique de l’héroïsme guerrier semble indissociable d’une mise en cause du récit épique et d’une interrogation sur le sens de l’histoire. Malgré ce double procès, se fait pourtant entendre,
dans L’Acacia, une rumeur d’épopée.

If epic poems at present are not any more written, Claude Simon in
L’Acacia calls however epic type and register. He stages war, stops on traditional motives of the epic story (the departure of the hero for war, death of the warrior). But most often, epic reference – the face of the hero – is depreciated. -is criticism of warlike heroism seems inseparable of an implication of the epic story and of a questioning on the tide of history. But in spite of this double trial, a rumour of epic poem however makes itself heard in L’Acacia.

Alain Froidevaux. « Une mobilisation continuée », p. 111

Cette lecture de L’Acacia développe la mobilisation en cours le 27 août 1939, lorsqu’un dilettante apprenti-peintre cubiste prend place dans des trains à destination d’un centre mobilisateur où il a été convoqué. Lors de ce voyage initiatique qui le prépare à l’épreuve du feu, le réserviste se livre à une forme de memento mori (associé à la mort de son père tombé au front le 27 août 1914). Dans l’espace et dans le temps du transport où il se remémore les vingt-six premières années de sa vie, ce « personnage conceptuel » (Deleuze) passe en revue pour les
examiner les images de son existence, pour en mesurer l’inconsistance. Une approche narratologique, stylistique et grammatologique conduit à reconsidérer la complexe ambiguïté de cette « autobiographie familiale
 », de ce « roman à base de vécu » raconté à la « troisième personne »
tout en prenant en compte le potentiel de « création continuée
 » en réserve dans la langue mobilisant la mémoire d’un écrivain, la présence esthétique d’une pensée de l’écriture à l’œuvre sur les « 
sentiers de la création ».

This reading of Claude Simon’s novel L’Acacia addresses the mobilisation that is underway on 27 August 1939 as a novice Cubist painter, a dilettante, boards successive trains that are bound for the mobilisation centre to which he has been summoned. In the course of this initiatory journey, which prepares him for his later trial by fire, the reservist mulls over a kind of memento mori (associated with the death of his father, who was killed at the front on 27 August 1914). In the space
and time of the train in which he recalls his first twenty-six years of life, this « conceptual character » (Deleuze) goes back over the images of his existence in order to examine them and gauge their insubstantiality. A narratological, stylistic and grammatological approach leads us to reconsider the complex ambiguity of this « family autobiography », this « novel based on lived experience » told in the « third person
 », whilst taking into consideration the potential for « continuous creation
 » that lies in reserve in the language mobilising the memory of a writer, the aesthetic presence of a thinking about writing that is at work in the « paths of creation ».

Geneviève Dubosclard. « Cadrages, décadrages et recadrages aspects du sujet et description dans L’Acacia », p. 135

« Dans L’Acacia (1989) Claude Simon revient sur l’Histoire et sur l’histoire de sa présence au monde. Participant de la composition romanesque, de multiples descriptions concourent à une écriture littéraire du sujet. Par quels processus de cadrage, de décadrage et de recadrage
sont-elles régies ? Qu’en advient-il dans cette « épopée subjective » d’un sujet compris en tant qu’être doué de conscience réflexive, capable ou non de se ressaisir lui-même en se différenciant de ce qui l’entoure ?

In L’Acacia (The Acacia), 1989, Claude Simon goes back over History and over the story of his presence in the world. Underpinning the novel structure, numerous descriptions establish « Relire L’Acacia » and substantiate a literary writing of the subject. -rough what processes of framing, unframing and reframing are they determined ? What becomes of them in this « subjective epic » of a subject seen as being endowed with a reflexive consciousness, able or not to get a grip on himself by
self-differentiating from what surrounds him ? »

Michel Sandras. « Multiplicités : la série énumérative dans L’Acacia »,
p. 147

La série énumérative est une caractéristique bien connue de l’écriture de Claude Simon. L’article examine les formes grammaticales qu’elle prend dans L’Acacia et montre comment la stratégie de l’énumération est renforcée par l’emploi massif du pluriel. Il propose quelques
réflexions sur les rapports qu’entretient l’extrême segmentation du texte avec deux motifs du roman : le chaos et la similitude.

The enumerative series is a well-known feature of Claude Simon’s writing. This paper ex-amines the grammatical forms it assumes if
L’Acacia, and shows how the enumerative strategy is strengthened by the massive use of the plural. It offers some reflections on the links between the extreme segmentation of the text and two motifs of the novel, i.e. chaos and similarity.

Chiara Palermo. « Le magma de l’espace-temps. La temporalité et l’imaginaire de L’Acacia », p. 161

Pour comprendre le statut de la temporalité dans L’Acacia, nous tentons une analyse du statut des images du roman, car celles-ci sont, pour reprendre des expressions merleau-pon-tiennes, « un dépôt du temps dans l’espace » ou encore une « chair du monde ». Leur pré-sence dans les descriptions nourrissant L’Acacia, a un caractère englobant, presque en mesure de se substituer à la fonction narrative du roman. Ainsi les images constituent-elles « un espace monumental » structuré par une trame invisible, lieu où l’évènement singulier et l’histoire collective palpitent.

To understand the status of temporality in L’Acacia, we attempt to analyse the status of the images of the novel. Because these images are, by quoting Merleau-Ponty, « a repository of time in « Relire L’Acacia ».
space » or a « flesh of the world ». Their presence in the descriptions that nourrish L’Acacia has a comprehensive character witch is able to replace the narrative function of the novel. The images are « a monumental space » structured by an invisible frame, where the singular event and collective history pulsate.

Archives

« Le 24eme de Marine. Histoire du régiment de Louis Simon » (extraits)
Texte présenté par David Zemmour, p. 183

Table de concordance. Par David Zemmour, p. 193

Prix Claude et Réa Simon

Emelyn Lih. « L’Orwell travesti de Claude Simon, ou la quatrième partie des Géorgiques », p. 199

La quatrième partie des Géorgiques établit un rapport intertextuel unique dans l’œuvre simonienne, et pose pour cette raison un défi interprétatif. À travers le dialogue entre l’instance narrative des Géorgiques et O., la figuration textuelle de l’écrivain George Orwell se battant et se débattant dans l’Espagne en guerre de 1936-1937, le lecteur peut discerner en filigrane un discours sur la guerre civile espagnole prodigué par le roman lui-même. Nous proposons une analyse de cette partie singulière du grand roman de 1981 qui met l’accent à la fois sur la complexité discursive et sur l’angoisse politique qui y sont exprimées.

Part IV of Les Géorgiques establishes an intertextual relationship without equivalent in the work of Claude Simon, and thus poses an interpretive challenge. Reading between the lines of the dialogue between the narrative instance of Les Géorgiques and « O. », the textual incarnation of George Orwell, fighting, fumbling and fleeing persecution in wartime Spain (1936-1937), the reader can discern a discreet political statement about the Spanish Civil War produced by the novel itself. Our analysis seeks to bring out both the discursive complexity and the ideological anxiety that characterise this unique section of Simon’s great 1981 novel Les Géorgiques.

 à propos d’Emelyn Lih et du premier Prix Claude et Réa Simon

Réception

Ilias Yocaris. « Un monde qui s’annonce : la réception critique de l’œuvre simonienne dans les pays anglophones (1959-1989) », p. 217

Ian de Toffoli. « Claude Simon et le latin : état des recherches », p. 261

Comptes rendus

Dominique Viart. « C. Simon, Le Cheval (1958) », p. 267
Brigitte Ferrato-Combe. « G. Novelli, Voyage en Grèce », p. 271
Joëlle Gleize. « Claude Simon – Rencontres. Textes réunis par A.L. Blanc et F. Mignon », p. 272
Annie Clément-Perrier. « M. Calle-Gruber et F. Buffet, Claude Simon, La mémoire du roman. Lettres de son passé 1914-1916 », p. 276
Jacques Neefs. « Claude Simon, Les Vies de l’Archive, M. Calle-Gruber, M. Balcázar Moreno, S.-A. Crevier Goulet et A. Frantz (dir.) », p. 278
Véronique Gocel. « G. Dubosclard, Le Rectangle et l’éventail : Étude sur la description dans les romans de Claude Simon », p. 283
Rémi Plaud. « Y. Hanhart-Marmor, Des pouvoirs de l’ekphrasis. L’objet auratique dans l’œuvre de Claude Simon », p. 286

Paroles de lecteur, paroles d’écrivain

Georges Bernard. « Première fois », p. 293

Maylis De Kerangal. « Une histoire en deux temps », p. 297

Actualité de l’œuvre

Manifestations, p. 303
Publications, p. 305

Dossier iconographique

Matériaux d’écriture, p. 307

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 résumés en pdf

Quatrième de couverture

Publié en 1989, L’Acacia est un roman-seuil, un roman-somme aussi.
Largement nourrie de l’histoire familiale et personnelle de Claude
Simon, mais aussi des œuvres antérieures, cette fiction croise deux fils principaux : l’histoire des parents issus de milieux que tout oppose, et l’expérience d’un jeune homme qui, après avoir voyagé dans l’est de l’Europe, vit au plus près la débâcle de mai 1940. À la croisée de ces deux fils, la guerre, qui voit le père tomber dans les premiers jours du conflit de 1914, tandis que le fils, qui a survécu, ne peut retrouver une part de son unité perdue que dans l’écriture.
Près d’un quart de siècle après la parution de L’Acacia, le temps est venu de faire le point sur les lectures consacrées à ce roman, mais aussi d’ouvrir de nouvelles perspectives.
Entretien avec Claude Simon, bilan critique, études, documents d’archives, matériaux d’écriture, paroles de lecteurs (dont un texte de Maylis de Kerangal) : autant de cheminements autour d’une œuvre majeure auxquels invite la présente livraison des Cahiers Claude Simon, et qui témoignent tous à leur façon de la vitalité inépuisable de
L’Acacia.

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Mots-clés

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